POURQUOI PARLER D'ADOLESCENTS AYANT COMMIS DES INFRACTIONS SEXUELLES PLUTÔT QUE DE JEUNES ABUSEURS OU AGRESSEURS ?
Bien qu’elle ait été utilisée pendant de nombreuses années, on rencontre de moins en moins souvent l’appellation « jeunes abuseurs » dans les programmes de traitement pour les adolescents. Plusieurs raisons militent en faveur de ce changement :
On sait qu’il existe des différences importantes entre les adolescents commettant des infractions sexuelles et les adultes ayant des comportements similaires :
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Les adolescents amorcent leur entrée dans le domaine de la sexualité active et leurs comportements ne sont pas encore cristallisés dans un mode préférentiel (d’où l’importance de l’intervention précoce).
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Une partie des comportements sexuels abusifs commis par les adolescents sont des comportements exploratoires. Bien qu’il faille intervenir pour éviter qu’ils ne s’ancrent pas dans de telles habitudes, le pronostic de changement est très positif dans leur cas. Nous sommes aussi conscients que ces comportements demeurent très dommageables pour les victimes et qu’on doit se soucier de les responsabiliser et d’intervenir pour éviter toute récidive.
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Les adolescents sont dans une période de changement rapide, d’acquisition de valeurs et de sens. Ils sont donc pour la plupart ouverts à l’influence thérapeutique.
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La recherche récente situe à environ 15% le taux de récidive chez les adolescents ayant commis des infractions sexuelles et dont les comportements ont été dévoilés. L’intervention thérapeutique abaisse encore de façon importante ce taux.
Notre expérience nous a aussi démontré que l’étiquette « jeune abuseur » a un effet pervers autant pour l’adolescent que pour ses parents. Le fait de se voir apposer un tel stigmate (on connait la réaction sociale face aux abuseurs) fait en sorte que ces adolescents mettent une partie importante de leur énergie à s’en défendre, à minimiser ce qui s’est passé. Ils retardent d’autant plus leur investissement dans le processus thérapeutique. Les parents, quant à eux, ont tendance à prendre la défense de leur enfant devant la définition dont on en fait.
Nous sommes souvent surpris de la réaction des parents lorsque nous leur expliquons que leur fils n’est pas un abuseur sexuel, mais un adolescent ayant commis une ou des infractions sexuelles. Se sentant moins jugés à travers les gestes de leur enfant, ils parviennent à reconnaitre plus facilement la gravité des gestes posés par leur fils et la nécessité d’une responsabilisation et d’une intervention thérapeutique. Leur implication dans le programme s'en trouve d'autant favorisée.